Carence de logements sociaux : états des lieux et perspectives

27/11/2023
penurie logement sociaux

    Au 1er janvier 2022, la France possèdait un parc locatif social de 5,3 millions de logements. 75 900 d’entre eux avaient été mis en location pour la première fois au cours de l’année 2021. Dans le même temps, on comptait 14 700 logements démolis et 13 900 vendus. Ainsi le parc locatif social a-t-il crû de 1,1 % entre le 1er janvier 2021 et le 1er janvier 2022. Depuis cinq ans, les mises en service de logements sociaux baissent pourtant tendanciellement, avec une diminution marquée des logements construits sous maîtrise d’ouvrage du bailleur.

    Le manque de logements sociaux touche tout le territoire. Selon l’organisation des bailleurs sociaux publics et privés, cette carence est plus marquée sur le littoral Atlantique, l’Île-de-France, la côte méditerranéenne et la métropole lilloise, 

    Le nombre de ménages en attente d’un logement social a atteint 2,42 millions fin 2022, un niveau qui n’a jamais été aussi élevé. Ce chiffre intègre à la fois les ménages en attente d’une première attribution et ceux déjà logés dans le parc HLM et en attente d’une mutation.

    Pourtant, depuis presque un demi-siècle, nombre de gouvernements ont légiféré afin de remédier à cette situation hélas récurrente.

    Les principales lois sociales des dernières décennies

    C’est en 1977 qu’est posé le principe d'une aide personnalisée (APL), permettant l'accès de tous à un bon logement. On assiste à la fin de la construction des grands ensembles ainsi qu’au retour du pavillonnaire et du logement individuel qui représente alors plus de la moitié des constructions de logements.

    Le 22 juin 1982, le ministre Roger Quilliot donne son nom à la loi qui reconnaît pour la première fois le droit à l'habitat comme droit fondamental. En instaurant ce droit, la loi Quilliot régule les rapports entre les propriétaires bailleurs et les locataires.

    La loi d'orientation pour la ville (LOV) affirme en 1991 la nécessité de la diversité de l'habitat et des politiques locales, tandis qu’en 98, la « Loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions » assure une plus grande transparence dans les attributions.

    Le 13 décembre 2000, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », modifie en profondeur le droit de l'urbanisme et du logement en France. Son article le plus notoire est l'article 55 qui contraint un certain type de communes à proposer au moins 20 % de logements sociaux. Par ailleurs, cette loi réaffirme la compétence des organismes HLM en matière d'accession à la propriété.

    Deux ans et demi plus tard, la loi urbanisme et habitat remanie fortement la loi SRU et met en place un dispositif fiscal en faveur des investisseurs.

    En mars 2007, la loi instituant le droit au logement opposable (DALO) et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale est votée.

    Le 25 mars 2009, la ministre du Logement Christine Boutin donne son nom à la loi de « mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion » (quelquefois appelée loi Molle) dont les 124 articles détaillent de nombreuses mesures concernant le logement social.

    Promulguée le 24 mars 2014, la Loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (dite loi ALUR) révise les rapports locatifs.

    La loi égalité et citoyenneté du 27 janvier 2017 a révisé les conditions d’exemption des communes du dispositif SRU, pour permettre le recentrage de l’application des obligations SRU sur les territoires sur lesquels la demande de logement social est avérée, tout particulièrement les territoires agglomérés ou, à défaut, bien connectés aux bassins de vie et d’emplois. Un décret, pris par le ministre en charge du logement en début de chaque période triennale, fixe, pour une durée de trois ans, la liste des communes exemptées des obligations de mixité sociale.

    En 2018 est votée la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (loi ELAN). Elle cherche à construire plus, mieux et moins cher et à faire évoluer le logement social.  

    Enfin le 21 février 2022, la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique (3DS) est votée. Ce texte pérennise les objectifs de construction de logements sociaux des communes soumises à la loi SRU au-delà de 2025. Celles-ci devront continuer à disposer d’au moins 20 ou 25% de logements sociaux. Les communes retardataires bénéficieront de plus de temps et les objectifs de logements sociaux pourront être définis localement, à travers un contrat de mixité sociale, signé entre le préfet et le maire.

    Zoom sur

    Les dispositions principales de la loi Molle en matière de logements sociaux

    Un « répertoire » des logements sociaux comportant les bilans annuels des organismes HLM et SEM est créé. Il reprend les informations transmises par ces organismes de manière annuelle et est distribué par le préfet de région aux :

    • préfets de départements ;

    • conseils généraux bénéficiant d’une délégation de compétence ;

    • établissements publics de coopération intercommunale sous contrat.

    De la même façon est instauré un droit de préemption au profit du préfet sous certaines conditions. 

    En effet, le préfet peut prendre un « arrêté de carence » lui permettant de se substituer à la commune qui n’a pas rempli ses objectifs de construction. Il peut, dans cette situation, conclure à la place de la commune une convention avec un organisme afin de construire les logements manquants.

    La loi Alur

    La loi Alur annonce une série de mesures pour soutenir l'habitat social et l'accès aux logements en simplifiant les démarches.

    Elle regroupe des mesures phares comme l'encadrement des loyers, la garantie universelle des loyers ou l'encadrement de l'activité des syndics. Un autre volet majeur du texte concerne l'habitat social et la lutte contre les marchands de sommeil. Le gouvernement, tout en poursuivant ses objectifs de construction de logements, souhaite notamment une plus grande transparence en matière d'attribution des logements sociaux. Les demandes seront simplifiées et le droit à l'information renforcé.

    La loi Alur rend possible d'effectuer sa demande de logement sur Internet.

    L'autre mesure concerne la constitution d'un dossier unique. Le demandeur pourra déposer les pièces justificatives une seule fois et l'ensemble sera accessible par tous les acteurs (bailleurs) du territoire.

    Instaurée en 2007, la loi DALO cherchait à garantir le logement à toute personne, résidant en France de façon stable et régulière, mais qui n'était pas en mesure d'accéder à un logement décent.

    Après 6 ans d'application du DALO, la loi Alur veut renforcer son efficacité notamment en facilitant la procédure. 

    Afin de favoriser la mixité sociale des régions en sous-logements sociaux, la loi Alur va inciter les communes à mobiliser le parc privé pour la production rapide de logements à loyer maîtrisé.

    Les grandes caractéristiques de la loi SRU

    Dans le but de développer une plus grande solidarité, et de renforcer les droits des citoyens/consommateurs, la loi SRU, et notamment son article 55, vise à répondre à la pénurie de logements sociaux tout en œuvrant pour l’équilibre et la mixité sociale des territoires.  

    L’article impose aussi à un certain nombre de communes (de plus de 1500 habitants en région parisienne ou 3 500 dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants) de compter désormais au minimum 20 % de logements sociaux.

    Toutes ces communes concernées doivent alors mettre en place des projets de Zones d’Activités Commerciales (ZAC) et construire des logements sociaux afin d’atteindre l’objectif de 20 % fixé par la loi. 

    Les villes qui ne respectent pas cette proportion de logements sociaux doivent s’acquitter d’un prélèvement annuel proportionnel à son potentiel fiscal et au déficit en logement social par rapport à l’objectif fixé par la loi. Ainsi, plus il manque de logements sociaux, plus la commune devra verser une compensation importante. 

    En ce sens, l’État peut obliger les communes à construire des logements sociaux, ou bien, le cas échéant, neutraliser le droit de préemption de la commune et délivrer lui-même un permis de construire “d’État”.

    Certaines communes peuvent être exemptées de cette obligation, notamment si elles ne disposent pas des infrastructures (transports en communs) ou zones constructibles nécessaires. De même, les communes qui enregistrent déjà un certain niveau de dépenses en faveur du logement social ne sont pas soumises à prélèvement en cas de déficit.

    La loi SRU cherche à diversifier les offres résidentielles dans les communes, pour plus d’égalité et de justice sociale. 

    La loi Elan a instauré un traitement spécifique pour les communes nouvellement entrantes dans le dispositif, qui disposeront, à compter de leur date d’entrée, de 5 triennaux pleins pour atteindre le taux légal de logement social. La loi institue un examen, tous les trois ans, par la commission d’attribution des logements, de la situation des locataires du parc social dans les zones tendues, notamment en cas de sous ou de suroccupation. Elle ouvre également de nouvelles opportunités en facilitant la colocation dans les HLM et en rendant possible la réservation de logements locatifs sociaux aux jeunes de moins de 30 ans, avec un bail d’un an maximum renouvelable.

    L’heure des bilans

    Les communes déficitaires en logements sociaux, y compris celles exonérées du prélèvement dans les conditions ci-dessus, sont par ailleurs soumises à des obligations triennales de rattrapage, qui sont à la fois :

    • quantitatives : il est fixé aux communes un nombre minimal de logements sociaux à financer ou à mettre en service sur la période triennale, en vue d’atteindre le taux légal applicable à l’échéance de 2025,

    • qualitatives  : les logements sociaux financés sur la période triennale doivent respecter une répartition équilibrée entre des différentes typologies, avec un minimum de 30 % de logements très sociaux - dits PLAI - pour loger les ménages à très faibles ressources et a contrario un maximum de 30 % (ou 20 % dans certains cas) de logements sociaux - dits PLS - destinés aux ménages dont les plafonds de ressources excédent le logement social classique (logement PLUS) mais qui rencontrent des difficultés pour se loger dans le privé. Il ne s’agit pas non plus de logements intermédiaires qui ne sont pas considérés comme du logement locatif social.

    À l’issue de chaque période triennale, le préfet vérifie le respect de ces objectifs de rattrapage. Selon la situation de la commune et les contraintes locales, le préfet peut sanctionner une commune n’ayant pas rempli ses objectifs.

    Lorsqu’au terme de la période triennale, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser n’a pas été atteint ou bien si la typologie de leur financement n’a pas été respectée, le préfet informe le maire de la commune de son intention d'engager la procédure de constat de carence.

    Les nouvelles dispositions

    La loi de Finances pour 2023 ne prévoit pas de réformes fiscales importantes pour le secteur du logement social. Toutefois, elle aménage certaines règles relatives à la taxe foncière, la TVA et à certaines taxes locales.

    Elle contient en effet plusieurs mesures fiscales intéressant le secteur du logement social. L’une des mesures phares est la suppression, sur deux ans, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Toutefois, les organismes de logement social ne sont que peu concernés par ce sujet dès lors qu’ils sont, en règle générale, exonérés de cette contribution. En revanche, les organismes sont impactés par différentes mesures de portée plus limitée qui concernent la taxe foncière, la TVA, certaines taxes locales…

    La modification de certaines règles relatives aux exonérations de longue durée au profit des logements locatifs sociaux est annoncée.

    Les opérations de construction neuve et les opérations d’acquisition-amélioration de logements locatifs sociaux, de même que les établissements d’hébergement temporaire ou d’urgence, peuvent bénéficier d’une exonération de TFPB de longue durée. 

    La loi prévoit une redéfinition des critères de performance énergétique permettant de porter la durée d’exonération à 30 ans (25 ans + 5 ans supplémentaires) pour les constructions neuves de logements locatifs sociaux.

    Enfin le régime d’exonération d’impôt sur les plus-values au profit des particuliers qui cèdent un bien immobilier destiné à la construction de logements locatifs sociaux est prolongé jusqu’au 31 décembre 2023.

    Il est prévu que le gouvernement remette un rapport d’évaluation sur ces mesures d’ici fin septembre 2023.

    Les plans Logement d’abord

    Lancé en 2017, le 1er plan quinquennal avait pour objectif de lutter contre le sans-abrisme et de favoriser l'accès au logement pour les personnes en situation de précarité. Ce plan reposait sur une approche globale privilégiant l'accès direct au logement plutôt que la mise en place de solutions d'hébergement temporaires.

    La priorité a été donnée à l'accès direct au logement pour les personnes sans domicile fixe. L'objectif était de proposer un logement stable au plus vite, en évitant autant que possible les solutions d'hébergement d'urgence.

    C’est ainsi que 440 000 personnes sans domicile ont accédé à un logement et que 122 300 logements sociaux ont été attribués à des ménages sans domicile.

    Le Plan Logement d'abord s’est inscrit dans une approche globale de la lutte contre la précarité et visait à résoudre le problème du sans-abrisme en proposant des solutions pérennes et adaptées aux besoins de chaque individu. Il a été mis en place en réponse à une situation préoccupante de sans-abrisme en France et a été salué pour son approche innovante axée sur l'accompagnement social et la réinsertion. 

    Son bilan positif a entraîné sa reconduction jusqu’en 2027.

    L’objectif de cette deuxième campagne est de maintenir une ambition forte sur la production de logements très sociaux ordinaires Comment ? En poursuivant les efforts de production de logements à bas niveau de quittance (PLAI et PLAI adaptés), en volume et en part de la production totale de logements sociaux. Il faut aussi accroître le parc locatif privé à vocation sociale en fixant des objectifs territorialisés pour créer 30 000 nouvelles places d’intermédiation locative dans le parc privé.

    Enfin, la relance de la production de résidences sociales est indispensable.  L’objectif est d’agréer 25 000 nouveaux logements en résidences sociales en métropole et outre-mer et revaloriser l’Aide à la Gestion Locative Sociale (AGLS) pour mieux accompagner les personnes logées tout en simplifiant les modalités d'octroi de l'aide.

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